En marchant le long de la mer, quelques vers de Pedro Salinas sont revenus. Les voici :
Avec joie
Combien, combien en a la mer,
combien de joies !
Etres de lumières, sur l’eau,
dansant sur la pointe des pieds.
Comme les flots finissent bien :
ils meurent en ballerines !
Dans les machines bleues
des fêtes se profilent.
Ni vagues, ni reflets ne sont
tout ce qui brille.
Ni écume celles qui jouent,
déjà évanouies.
C’est la comédie que la jouissance
monte chaque jour.
La constance dans le bonheur.
Oui, celles qui s’obstinent
Comme bonheurs, à être.
Ténacité, dans la félicité.
Les joies, la mer
elle ne les perd jamais.
Alors pourquoi ai-je
la main sur ma joue ?
Tiennes, ou miennes, peu importe,
puisqu’on les voit,
Dans l’air, dans le soleil, laissant resplendir
leur corps d’ondines ?
Si toutes les jubilations sont siennes,
elle me les offre toutes,
Comme la vie, chaque jour,
elle m’offre ma vie,
En acceptant la lumière
qu’une autre aurore m’envoie ?
Les joies qui me manquent,
elle me les fabrique.
Depuis ses lointaines profondeurs
elles cheminent vers moi.
Et là dans les yeux, les siennes
se font miennes.
Pedro Salinas, Avec joie, in La mer lumière, Presses Universitaires Blaise Pascal, 2011, p. 41,
gourmandise de mots - Page 3
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Quelques vers pour la journée.
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Bleu baleine.
En lisant le bel ouvrage d’Emmanuelle Lambert, Giono furioso, elle cite ce « bleu baleine » que Giono a utilisé dans son œuvre, si expressif, auquel on repense parfois quand on regarde un paysage. Mais où donc Giono a-t-il écrit « bleu baleine » ? Une solution possible : le relire. En passant à la médiathèque, que voit-on justement sur une table, posé là ? Un roman de Giono, Un roi sans divertissement. On l’emprunte, pour éviter d’avoir à le chercher à la maison. Prenant le bateau pour aller balader, on le commence et, page 11 de l’édition Folio :
« Le col de Menet, on le passe dans un tunnel qui est à peu près aussi carrossable qu’une vieille galerie de mine abandonnée et le versant du Diois sur lequel on débouche alors c’est un chaos de vagues monstrueuses bleu baleine … »
Ceci confirme que les livres sont bien vivants.